En terre lettone
Il est un petit paradis sauvage à la bordure nord orientale de l’Europe oú les hommes vivent dans des logis de bois entre les pins et les lacs, les champignons et les baies. Ici la cueillette est de saison. A la relative froideur des conversations répond la chaleur du sauna et les caresses des bouquets de feuilles de ce vaporeux rituel. Ici on parle peu mais on continue païennement à caliner des arbres et à fêter le solstice d’été plus que noël ou l’indépendance.
Ces dernières années, cette nature sauvage ne suffit plus à retenir certains de ses occupants qui pensent que l’herbe est plus verte en ville ou à l’ouest de l’Union Européenne. D’autres, moins nombreux, font partie de la contrexode et ont élu domicile au grand air.
C’est parmi ceux là, dans une fromagerie, que je vais vivre et travailler pendant trois semaines, près d’une ville qui s’appelle Madona.
Témoin quotidien de la traite des chèvres depuis mon établi, je redécouvre les joies du travail manuel et des journées vite écoulées à me concentrer sur la réalisation d’un meuble, une tache intelectuellement simple et techniquement complexe qui repose l’esprit et fatigue le corps. Quoi de plus gratifiant que de voir tenir devant soi, solides, stables et droits, 8 canapés et trois tables construits à la sueur de son front et la siure de ses planches. Caresser le doux résultat de plusieurs jours de ponçage assourdissant est une médaille. Le repas du soir, une récompense, d’autant qu’il y a toujours un bout de fromage sur la table ou dans les plats. La campagne ne connait pas plus les week ends que le stress qui les rends nécessaires. Il y a un tas de raisons de battre la campagne.