A vos marques
Ce jour là j’étais bien le seul à aller en Mongolie sur le pont qui sépare le Perreux de Bry sur Marne. C’était le jour J, la vie devant moi, cette route d’infinies promesses, cette liberté grisante, presque totale. “Bon allez on y va” me dit ma mère qui prennait la photo. Oui, mes premiers auto stoppés auront été mes parents à qui je dois mes premiers 300 kilomètres et bien plus encore.
La Lorraine, c’est aussi une famille. Pour quelqu’un qui n’a jamais vraiment juré par les liens du sang, je reconnais que ça fait drôlement plaisir de voir ces gens là et de retrouver ce monde connu et imprégné de souvenirs. Mon passage en Mauritanie m’aura fait réviser ce que c’est que la famille : un mot de passe magique, un endroit où on est quelqu’un et où il y a une place pour vous. Une belle chose.
Un matin on a sorti Kitch, le berger allemand rescapé du décès de mon grand père. Le sentiment familial est tel qu’il a investi cette bête d’un quelque chose qui la dépasse : on ne promène pas seulement un toutou là mais on fait un tour avec la réincarnation de son ancien maître. Et Kitch le sait, les chiens nous comprennent, faut pas croire.
Même si je n’y ai jamais vécu, ce n’est pas de la quiche de parler de la Lorraine comme si je la découvrais, de trouver cette inspiration du voyageur face à l’inconnu. Et pourtant, les chants de colza, les bois, les colines, les villages, les forêts d’antonoirs, la rue principale de ces villages fendus par la route et ridés par le temps, les maisons moyen âgeuses de Bar le Duc et de Marville, la cathédrale de Metz, il y a des choses à dire de ce coin là. Il faudrait raconter aussi le déjeuner du bonheur entre pelouse et soleil, la daube de Mamie, toujours la dernière avant la suivante, et l’odeur de sciure qui se dégage de l’atelier menuiserie du tonton. Quoi qu’il en soit, ce rappel valait le détour et me voilà requinqué pour la suite qui commence lundi 9 mai avec une pancarte qui dit Luxembourg.